Homiz : la cohabitation intergénérationnelle et solidaire
Publié par Shoona Woolley, journaliste le | Mis à jour le
Cette plateforme de cohabitation intergénérationnelle a pour objectif de faire face au mal-logement des jeunes et de lutter contre l'isolement des personnes âgées.
20% des jeunes en France vivent sous le seuil de pauvreté. Homiz, plateforme digitale de service locatif solidaire met en relation séniors et jeunes pour créer, via l'habitat, une solidarité intergénérationnelle. Primée pour le prix local et régional par la Fondation du Crédit Coopératif, Homiz a été créé par trois associés. Après certaines expériences personnelles liées à la difficulté d'accéder à un logement, ils se sont tournés vers la mise en place d'une plateforme digitale pour promouvoir l'intergénérationnalité et la solidarité qui en découle.
Lancée en janvier 2020, Homiz a été impacté par la crise sanitaire, mais a mis en lumière la précarité des jeunes et la solitude des personnes âgées. Homiz est présent à Paris, Lyon, Bordeaux, Nice et Lille pour permettre aux générations de se rencontrer et de se faire confiance.
La cohabitation intergénérationnelle comme vecteur de lien social
Existant depuis une quinzaine d'années mais rendue possible depuis la loi Elan en 2018, la cohabitation intergénérationnelle est porteuse d'espoir et de solidarité pour deux pans de la population, souvent en difficulté. Cette loi donne un cadre juridique à cette pratique d'habitat qui l'autorise sous réserve que le jeune soit âgé de moins de 30 ans et que la personne chez qui il vient habiter ait plus de 60 ans. Même si le sénior est locataire, le propriétaire n'a pas de recours possible s'il éprouve un désaccord avec cette cohabitation, mais en général le bailleur voit en cette cohabitation une rentabilité pour son parc locatif. Les personnes âgées sont souvent seules et isolées et les jeunes pendant leurs études ont du mal à se loger décemment et à un prix abordable.
" 90% des personnes âgées souhaitent se maintenir à domicile, et 85% d'entre elles ont un logement trop grand ou une chambre disponible ", déclare Benjamin, l'un des fondateur d'Homiz. Ce qui représente donc près de deux millions de séniors qui peuvent accueillir un jeune chez lui. Cette solution face au mal-logement des jeunes leur permet d'économiser en évitant de payer un loyer exorbitant, tout en étant souvent logé dans un secteur attractif.
" L'objectif est vraiment de créer des ponts entre les générations, par le logement, qui sont des ponts forts puisqu'on parle d'habitat. Nous voulons aussi créer une offre de logement qui soit hors marché ", indique Benjamin. C'est une solution multiple puisqu'elle allège également la charge mentale et le stress des aidants qui sont près de 11 millions en France à s'occuper plus ou moins quotidiennement de leurs parents. " Avoir un jeune chez son parent, ça rassure. Les aidants sont en relation avec les jeunes qui viennent habiter chez leur parent ", explique l'un des fondateurs d'Homiz. Il existe aussi des numéros de téléphones pour les séniors qui ne seraient pas à l'aise numériquement. " Notre but est de toucher les 60 à 75 ans qui sont à l'aise avec les outils numériques et pourront accéder au site directement. Et pour toucher les personnes de 75 à 90 ans, on est en lien par leurs enfants, qui réalisent la démarche pour eux ", précise Benjamin.
Un contrat en confiance
L'habitat est un engagement relativement fort. Les freins existent mais Homiz met en place des procédures pour les dissiper le plus rapidement possible. " L'aspect confiance est super important, nous sélectionnons nos jeunes et nos séniors très rigoureusement. Nous cadrons juridiquement la cohabitation, pour la casse physique, c'est grâce à l'assurance de responsabilité civile, pour les dégâts d'habitation c'est l'assurance habitation classique ", indique Benjamin.
" Nous rédigeons un contrat spécifique de cohabitation intergénérationnelle, qui définit la durée et le loyer éventuel. Chaque membre qui s'inscrit s'engage à respecter les consignes et les valeurs de solidarité et d'écoute dans la cohabitation ", ajoute-t-il. Pour ce qui est du réseau des jeunes et des séniors, Homiz fait en sorte de savoir d'où ils viennent : " C'est un écosystème partenarial, nous nous référençons auprès de structures jeunes ou d'universités avec un référant, qui vont eux-mêmes nous envoyer des jeunes qui seraient intéressés. Côté séniors c'est la même chose, nous travaillons avec des bailleurs sociaux, des mutuelles, qui nous aide à identifier et sensibiliser les séniors. " Une fois cette chaîne de confiance créée, s'en suit un entretien téléphonique entre les deux parties prenantes pour réviser les attentes de chacun. Si tout ce passe bien et qu'une entente est trouvée, Homiz se charge ensuite de rédiger un contrat de cohabitation.
Un service gagnant-gagnant
Homiz souhaite se différencier des autres plateformes homologues. Elle permet à la personne qui accueille de définir librement ses conditions d'accueil, " comme par exemple un loyer encadré à 60% du marché et maximum cinq heures de services par semaine pour le jeune, comme des courses, une aide informatique, un accompagnement de loisir... ", précise Benjamin. Le tout en conservant un équilibre pour le jeune qui économise un loyer classique en restant concentré sur ses études ou autres activités.
" Nous voulons avoir une approche gratuite pour le sénior et nous avons de très faibles frais de services pour le jeune qui sont à 30 euros par mois. Ces frais couvrent un accompagnement tout le long de la cohabitation ainsi que la création du contrat de cohabitation ", justifie le fondateur. Il conclut en rappelant la promesse d'Homiz qui est " un choix libre et gratuit des conditions d'accueil pour le sénior et de faibles frais pour le jeune, tout en gardant une approche humaine mais aussi numérique ".
L'entreprise de service espère 200 cohabitations pour la rentrée de septembre et se dit optimiste malgré la crise sanitaire. " Nous avons actuellement 10 cohabitations en cours, mais nous sommes confiants, puisque le Covid a mis en lumière la solitude des ainés et la précarité étudiante. Les séniors, pour une partie, se sont formés aux outils numériques pour rester en contact avec leurs proches et en septembre, à priori, la vaccination aura progressé et les séniors comme les jeunes seront principalement vaccinés ", confie Benjamin.