Bérengère Assaiante (But) : "L'entreprise doit être plus responsable"
Publié par Philippe Lesaffre le - mis à jour à
Ekopo a échangé avec Bérengère Assaiante, directrice RSE de BUT, afin de comprendre comment la société entend réduire ses impacts, notamment sur la conception des meubles, qui représente 64 % du chiffre d'affaires de But. "Les collaborateurs nous challengent", dit-elle.
Votre poste à la direction de la RSE a été créé il y a un an et demi, pourquoi ?
Bérengère Assaiante : Je m'occupe du service RSE depuis un an et demi, c'est un département rattaché au président, qui est arrivé il y a plus de 3 ans. L'idée était de porter notre démarche RSE de manière plus directe. Nous avons conçu une véritable stratégie. Avant, il n'y avait qu'une chargée de mission RSE, rattachée à la communication. Auparavant, j'ai travaillé dans le domaine des achats, et, selon moi, cette expérience est un atout. Car cela me permet de mieux comprendre les rouages, les enjeux, les contraintes des équipes et d'essayer d'apporter, au mieux, des modifications. Une entreprise de retail doit en premier lieu transformer le produit. Achats responsables, écoconception, impact carbone...
Quelles sont vos missions les plus importantes ?
Mon rôle principal ? C'est de convaincre au quotidien, d'embarquer l'ensemble des strates de l'entreprise et les parties prenantes dans la nouvelle feuille de route RSE, co-construite par un comité RSE depuis un an. L'entreprise doit être plus responsable, notamment sur le « mieux produire », l'un des piliers de notre stratégie. En mars 2021, on a réalisé un audit Afnor (label basé sur la norme ISO 26000), ce qui nous a permis de mettre en avant des actions déjà réalisées et d'identifier les axes d'amélioration. Notre ambition : devenir l'acteur de référence de l'ameublement, de la décoration et de l'électroménager accessibles à tous et, en même temps, respectueux de l'environnement. C'est dans l'ADN de l'entreprise créée il y a 50 ans.
La RSE pousse à transformer les métiers
« Convaincre », est-ce une mission difficile ?
Cela dépend des individus, il n'y a pas de règle. De nombreux collaborateurs sont convaincus qu'il est nécessaire de s'engager, de changer. Tout cela participe, en outre, à développer un sentiment d'appartenance, à l'attractivité de l'enseigne. En revanche, certains s'interrogent, c'est vrai : les modifications nécessaires vont-elles impacter leur quotidien ? On doit se challenger, se réinventer. Je le dis en toute transparence : la RSE pousse à transformer les métiers.
Exemple : l'objectif d'un acheteur jusqu'à présent était la rentabilité et le chiffre d'affaires. Deux critères qui sont encore fondamentaux aujourd'hui. Or aujourd'hui, il faut y ajouter le devoir d'écoconception des produits. Cela signifie : réfléchir au flux logistique, à la sélection des fournisseurs et des matières. Le vendeur a aussi à s'en approprier pour pouvoir mieux valoriser les biens vendus en magasins.
Et certains veulent-ils que But avance plus vite ?
Je n'ai pas à convaincre l'ensemble des salariés, c'est la bonne nouvelle. En effet, beaucoup ont envie qu'on aille plus vite. Les collaborateurs nous challengent. Par exemple, sur l'écoconception, la pandémie a fait évoluer les consommateurs. Ils sont de plus en plus demandeurs de made in France, de biens plus écoresponsables. Or, en magasins, on peut encore progresser sur la signalétique et l'information sur la provenance des produits, sur la fabrication. C'est le rôle d'une entreprise aujourd'hui d'accompagner les consommateurs vers "l'éco-choix" et la transparence. Et les personnes qui travaillent dans les points de vente nous demandent notamment plus d'arguments et d'informations pour pouvoir répondre aux clients.
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L'ONG Earthworm foundation contrôle la traçabilité du bois des meubles
Quelle est votre politique concrète en matière de bois ?
Le bois représente chaque année 800 millions d'euros d'achat. Le meuble, c'est 64 % de notre chiffre d'affaires. Donc c'est un sujet assez important ! Notre ambition, c'est d'avoir en 2024 100 % de bois issu de source responsable. On en est à 75 % à l'heure actuelle.
Du bois « responsable », c'est-à-dire ?
Il s'agit de bois éco-certifiés (labels FSC et PEFC). On souhaitait également que la traçabilité du bois soit contrôlée par une ONG, Earthworm foundation, de la forêt à la conception des meubles au sein des usines. Quand on référence un fournisseur, on met en place un pré-audit « politique bois » au niveau de l'usine, sur la provenance, la transformation, et la certification, si elle existe. On récupère des informations, on vérifie, puis on les partage à l'ONG. Son rôle est d'évaluer l'usine en matière environnementale, en matière sociale, sur la provenance, le traitement et la transformation des matières premières. Il en résulte un score. Il est possible que celui-ci ne soit pas à la hauteur de nos attentes ; mais dans ce cas-là, on peut accompagner l'usine, afin qu'elle puisse progresser sur tel ou tel point.
On envoie des produits invendus à Emmaüs Défi
Et d'où vient votre bois ?
80 % de nos achats proviennent d'Europe, le reste d'Asie. En Europe, on s'approvisionne en Italie, en Allemagne, et en Europe de l'Est, notamment en Pologne, en Roumanie et... en Ukraine. 30 % du bois européen provenait jusqu'à présent de la zone Ukraine-Biélorussie. Ce n'est pas simple. Or, grâce à notre réseau de fournisseurs, on a trouvé des solutions ailleurs, après le déclenchement du conflit.
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Vous êtes aussi engagés sur l'aspect social, dites-vous... En quoi ?
On envoie en particulier à Emmaüs Défi des camions de produits invendus ou avec un défaut à réparer deux ou trois par an. Et, aussi, plus ponctuellement, on met par exemple à disposition de structures solidaires des biens de première nécessité. Cela peut prendre la forme d'une box solidaire composée de tout ce qui est nécessaire pour dormir (couette, matelas, oreiller, parure) à destination de personnes ayant perdu leur logement brutalement. On a également apporté notre soutien par rapport au conflit en Ukraine, par un don financier, mais aussi en aidant des mairies près de notre siège social via des dons de produits pour les réfugiés ukrainiens.