[EKOPO AWARDS] Noémie Bauer (Pernod Ricard) : "Il faut embarquer tout le monde"

Mai 2011, New York. Noémie Bauer intègre Pernod Ricard lors du « responsibl'All Day » du groupe. Le principe : les collaborateurs donnent de leur temps à une cause locale. Ce jour-là, les équipes se penchent sur les dangers de l'alcool au volant et les programmes de prévention routière en vue de sensibiliser les populations américaines. Un peu la mission du début de sa carrière : embauchée au service juridique, elle atterrit vite, au bout de six mois, au département Corporate social responsability (CSR), ou RSE en VF. Cet univers, elle ne le quittera plus, jusqu'à piloter, depuis Paris, la stratégie RSE de Pernod Ricard.

Du verre recyclé et des contenants réutilisés

Représentante du numéro 2 mondial des vins et des spiritueux aux multiples marques, elle sait qu'elle a une responsabilité importante. Pour perdurer dans le temps, celui-ci n'a pas le choix : il doit limiter son empreinte environnementale et ses émissions de gaz à effet de serre. Promouvoir l'économie circulaire, vaille que vaille. Et ça commence au début de la chaîne : « Au niveau du terroir, dit-elle, on distille du blé, on presse du raisin pour le vin et le champagne, et ce qui n'est pas utilisé sera réutilisé pour nourrir le bétail ou pour la revalorisation énergétique. » Puis s'assurer, de l'autre côté de la chaîne, que les bouteilles soient collectées, via le tri, notamment. Utile puisque la stratégie est d'utiliser 50 % de verre recyclé d'ici à 2025. « Sacré challenge notamment pour les contenants clairs », indique Noémie Bauer. Pour l'heure, on sait que, pour la marque Ricard, par exemple, le groupe propose des bouteilles conçues à partir de 80 % de verre recyclé.

Action intéressante, mais pas neutre en carbone. Le but ultime : réemployer les contenants, sans les détruire. Possible ? Un test est en cours depuis quelques jours à Singapour, et bientôt à Hong Kong (et peut-être ailleurs). But de l'opération : fournir à des cafés, à des hôtels des fûts d'alcool de 4,5 litres au lieu des bouteilles moins volumineuses. Des contenants lavables, réutilisables à l'infini, presque. « Le projet note Noémie Bauer, permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre liées au packaging et au transport de 70 %. » Une action, donc, « vertueuse » qui a vu le jour grâce au concours de la start-up EcoSpirits, basée en Asie.

Sensibiliser prend du temps

« La force d'un grand groupe, c'est de pouvoir collaborer avec d'autres pour que les choses avancent plus rapidement. » Noémie Bauer, directrice « sustainable business », en est convaincue : « L'union fait la force. » Et cela concerne aussi les fournisseurs, en particulier les verriers. « Nous avons rejoint le mouvement Glass Futures, qui rassemble des académiques et des entreprises de bières et de spiritueux, afin de trouver un moyen de décarboner la filière du verre. C'est une industrie lourde." Elle est très émettrice. Voilà l'idée : "Travailler avec nos fournisseurs pour avoir encore plus d'impact." En vrac : qu'ils s'engagent à respecter les droits humains, à limiter l'usage des pesticides et toutes pollutions. « Nous devons être vigilants et promouvoir des pratiques agricoles plus respectueuses de l'environnement. » Accompagner toutes les parties prenantes... jusqu'aux cafés et hôtels. Pernod Ricard entend, via la formation 'le bar de demain', aider les bars à réduire leur impact, notamment la production de déchets. « C'est l'un de mes projets fétiches », sourit-elle.

Sensibiliser... On y revient. « Il faut vraiment qu'on réussisse à embarquer tout le monde. Y compris en interne. Et, du coup, cela demande d'argumenter, au quotidien », ajoute-t-elle, quelques années après ses études en droit environnemental. Oui, trouver les moyens de limiter l'empreinte environnementale du groupe demande du temps, de l'énergie. Et « de la ténacité ».