Dons d'invendus : « Les entreprises ont un vrai rôle à jouer »
L'Agence du don en nature récupère les invendus des entreprises pour les redistribuer aux associations dans le besoin. Un engagement capital en ces temps de crise sociale, indique Jérémy Fretin, directeur de développement et RSE de l'association.
Je m'abonneCela fait près de quinze ans que l'aventure a démarré. L'Agence du don en nature, lancée en 2008, organise des opérations de redistribution de biens d'hygiène, de beauté, de jeux, de vêtements, d'équipements de la maison à des associations menant des missions sociales. Elle est en relation avec 1 300 organisations sur le terrain, tant des structures d'hébergement d'urgence, d'aide à l'enfance que des ateliers et chantiers d'insertion, ainsi que des épiceries sociales et solidaires. Concrètement, les entreprises partenaires leur livrent les biens à donner dans un "entrepôt-école", dans lequel des personnes en insertion et en réinsertion professionnelle, en particulier, travaillent pour les redistribuer. L'échange des produits non écoulés peut également être effectué au niveau local, sans passer par le centre de stockage, situé à Dourges, dans les environs de Lens.
Précisons que la réglementation a évolué en faveur du don. Le 1er janvier 2022, la loi Agec (antigaspillage) est entrée en vigueur. Et elle vise - notamment - à interdire aux entreprises (producteurs, importateurs, distributeurs) de détruire leur stock de produits non alimentaires invendus. Pour autant, toutes ne respectent pas encore la loi, toutes ne s'y sont pas encore mises. « Beaucoup d'acteurs n'ont pas forcément connaissance du texte ou ne se sont pas encore structurés pour sauter le pas », indique Jérémy Fretin. Selon lui, certaines ne détruisent plus leur stock mais optent pour d'autres solutions que le don pour éviter la destruction, telles que le réemploi ou le recyclage : « Certaines font appel à des déstockeurs, développent des stores solidaires. »
Les avantages du don
L'idée, donc : sensibiliser, montrer que « les associations sont des acteurs de confiance », que le don n'est pas susceptible de dévaloriser une marque. Rassurer aussi sur l'aspect fiscal, administratif... En clair : apporter les informations nécessaires pour que les entreprises s'engagent et passent en priorité par le don pour éviter de détruire les stocks de produits non vendus.
En comprenant d'autant plus qu'elles y ont tout intérêt. D'abord, le cadre fiscal encourage la pratique de dons. Intérêt économique, donc, mais aussi écologique et social. Cela permet de ne pas jeter des biens qui pourront servir à « des personnes en situation d'urgence, de précarité, aux fins de mois difficile », dit-il. Le geste est solidaire, peut être effectué dans le cadre d'une démarche plus générale de RSE, peut mobiliser et impliquer les parties prenantes, les collaborateurs, via la communication interne et puis externe... Sans compter les consommateurs, qui deviennent très exigeants, on l'a vu.
Des dons d'invendus aux dotations : l'attente est grande
Tout de même, le don a bien progressé, et « il est plébiscité », désormais, par beaucoup. « Quand l'Agence s'est lancée, en 2008, les entreprises donnaient très peu. Cela a pris de l'ampleur il y a trois-quatre ans, constate Jérémy Fretin, directeur du développement de l'association. Nous avons redistribué deux fois plus de produits en 2021 qu'en 2019 ».
Mais il faut aller plus loin, changer de logique, si on pense aux perspectives à venir. « Car, bien que l'on puisse s'attendre à une croissance des dons, il y a aussi cette crainte que les entreprises gèrent de mieux en mieux leur stock de marchandises. » C'est une note positive. Seulement, si le nombre d'invendus se raréfie, que faire ? Parce que, de l'autre côté de la chaîne, « la demande des associations progresse, au vu de la montée de la précarisation » en cette période de crise sociale. Selon Jérémy Fretin, « il faut s'engager, il y a une vraie attente. L'approvisionnement doit être permanent ». C'est pourquoi l'Agence du don espère aussi bénéficier de dotations en biens sur telle ou telle gamme de produits fortement demandés par les structures solidaires. « Les entreprises peuvent jouer un vrai rôle... »